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Quelles réponses politiques face aux événements climatiques extrêmes ?

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En Argentine, en Espagne, ou dans les Pyrénées-Orientales, les sécheresses sont particulièrement précoces et importantes cette année, avec des effets dramatiques pour le secteur agricole. Ce type d’événements, déjà de plus en plus fréquent, est appelé à se multiplier avec le changement climatique. L’Espagne, qui avait mis au point un système de transferts d’eau permettant le développement de l’agriculture et du tourisme dans les régions les plus sèches, voit les limites d’un système centré sur la répartition de l’offre en eau. De quelles options dispose le secteur agricole pour faire face à une augmentation de la fréquence de ces conditions, et comment les politiques publiques peuvent-elles l’accompagner ?

Une sécheresse de plus en Espagne

 

  • Le secteur agricole risque d’être durablement fragilisé par les conditions climatiques de 2023

Les sécheresses et vagues de chaleur sont de plus en plus fréquentes et intenses partout dans le monde. En Espagne, cette année est marquée par un épisode particulièrement précoce : le pays a connu son premier pic de chaleur dès fin avril, avec des températures avoisinant par endroit les 38°C, et il n’a presque pas plu depuis janvier dans les zones de cultures de la péninsule ibérique. Résultat, les cultures accusent d’importants retards de croissance, et certaines pourraient ne pas être semées[1]. Les rendements prévisionnels des céréales sont inférieurs de 20 à 30% en moyenne sur 5 ans, sachant que l’année dernière avait déjà été affectée par la sécheresse. La pousse de l’herbe, donc l’élevage, est également affectée par ces conditions dramatiques.

Entre pertes de rendement et diminution des surfaces implantées, les prévisions de production sont pessimistes : entre 3,5 et 5 millions d’hectares de céréales non irriguées pourraient ne pas être récoltés, sur les 6 que compte le pays. Dans les régions les plus touchées, la production d’olives et de fruits à coque non irrigués ne devrait pas dépasser 20% de la moyenne. Des conséquences sur la production agricole du pays qui risquent de se prolonger au-delà de la récolte de cette année, puisque la sécheresse risque d’avoir des effets à plus long terme pour les cultures pérennes car les jeunes arbres et ceps risquent de mourir, menaçant la pérennité des vergers.

Au-delà des frontières espagnoles, des répercutions sont à attendre chez les partenaires commerciaux du pays, dont de nombreuses productions sont principalement orientées à l’export, comme les fruits et légumes (60% d’entre eux sont exportés), l’huile d’olive ou encore le vin. Les pays destinataires de ces productions, dont la France, risquent de voir leurs prix augmenter, voire de faire face à d’éventuelles pénuries.

  • Un mode de gestion de l’eau qui montre ses limites

La situation est donc plus qu’inquiétante. Comment en est-on arrivé là, alors que le système espagnol est souvent cité en exemple concernant la gestion de l’eau ? Pour pallier le manque d’eau dans la partie sud du pays et développer son agriculture et son tourisme, l’Espagne a construit d’importantes infrastructures de stockage et de transfert de l’eau entre bassins, depuis le nord, excédentaire, vers le sud, selon l’idée que le pays dispose de suffisamment de ressources en eau pour répondre à la demande, mais qu’elles sont simplement mal réparties. Point d’orgue de cette stratégie, un canal de près de 290 km a été construit en 1979 pour transférer l’eau du Tage, le principal fleuve espagnol, qui passe vers Madrid et se jette dans l’Atlantique après avoir traversé le Portugal, vers la Murcie et l’Andalousie. Près de 1200 barrages et des bassins de rétention complètent le dispositif, permettant au pays de stocker 48% de ses flux d’eau annuels, contre 4,7 % en France.

Ce dispositif est indispensable au fonctionnement de l’agriculture espagnole, qui repose en grande partie sur l’irrigation : 25% des surfaces agricoles, fournissant 65% de la production agricole espagnole, sont irriguées. A titre de comparaison, 6,8% de la SAU française était irriguée en 2020[2].

Le système espagnol de gestion de l’eau a joué son rôle pendant des années, permettant à des régions sèches de développer leur agriculture. Mais il montre aujourd’hui ses limites face à un manque exceptionnel de précipitations hivernales, cruciales pour assurer le remplissage des réservoirs, dont les niveaux continuent de descendre : en moyenne, les réserves hydriques sont actuellement remplies à moins de la moitié, voire au quart dans certains bassins[3], en raison de l’absence de pluies qui les a empêchées de se reconstituer cet hiver.

Cette situation relance les débats et conflits autour de l’eau dans le pays. Des vols d’eau et des puisages illégaux ont également été rapportés[4], un phénomène qui n’est pas nouveau mais s’est récemment intensifié. Plus largement, les transferts d’eau entre bassins sont accusés d’assécher les régions moins fertiles mais plus humides qu’ils ponctionnent, au détriment de leur économie et de leur environnement. Preuve que le sujet cristallise les passions, quand le gouvernement a évoqué début mai la perspective de diminuer le plafond des transferts d’eau depuis le Tage pour protéger sa faune et tenter de faire remonter son niveau, il a essuyé une volée de bois vert des agriculteurs et des régions qui dépendent de ces transferts, dépassant leurs désaccords politiques pour s’allier contre la baisse des transferts, contre laquelle le syndicat des irrigants, le Scrats, a même déposé un recours en justice[5].

Pour tenter de limiter les dégâts de la sécheresse, le gouvernement a également présenté un plan d’urgence de 2,2 milliards d’euros. Les deux tiers de la somme seront dédiés à la construction d’infrastructures comme des usines de désalinisation, pour augmenter la quantité d’eau disponible et améliorer l’efficience du réseau existant. Le tiers restant ira directement à l’agriculture, dont la moitié pour soutenir l’élevage et compenser la hausse des coûts de production liée aux achats d’aliments. Le COAG, principal syndicat agricole du pays, considère que ces mesures ne seront pas suffisantes et réclame des aides supplémentaires pour les céréaliers qui ne pourront pas récolter. Dans tous les cas, ces mesures constituent une réponse conjoncturelle à une crise structurelle. Même si la gestion de la ressource en eau peut encore être optimisée, par exemple en poursuivant le développement de l’irrigation par aspersion, plus efficace que l’irrigation par inondation[6], la réduction de la demande en eau risque de devenir inéluctable. Première consommatrice d’eau du pays, l’agriculture va devoir s’adapter, au risque de perdre des agriculteurs et des productions en route. Les pouvoirs publics ne pourront pas renouveler les aides à l’achat d’aliments chaque année, et le système assurantiel n’est pas fait pour compenser des pertes de rendements sur le long terme. Le secteur agricole va donc devoir être accompagné pour repenser ses pratiques, et se réorienter vers des productions moins intensives en eau.

La transformation des systèmes agricoles est inéluctable

  • Des événements de plus en plus fréquents et intenses

La situation espagnole est particulièrement préoccupante, mais elle n’est pas isolée. D’après un récent rapport du Parlement Européen, les sécheresses sont appelées à se multiplier dans tout le sud de l’Europe du fait du changement climatique. Les vagues de chaleur toucheront plus fréquemment toute l’UE, et l’Europe centrale subira aussi davantage de précipitations extrêmes pouvant entrainer des inondations[7]. Autant de menaces pour le secteur agricole qui engendrent des baisses de rendement et des hausses des coûts de production, par exemple quand les éleveurs doivent acheter du fourrage pour nourrir leurs bêtes. Les pertes économiques associées sont particulièrement importantes pour les vagues de chaleur et sécheresses. L’impact économique de ces dernières est ainsi estimé à 4,8 milliards d’euros par an en 2015, qui pourrait être multiplié par 6 d’ici 2100[8]. Les baisses de production associées aux événements climatiques extrêmes n’affectent pas pour le moment la sécurité alimentaire de l’UE n’est mais elles contribuent à la volatilité des prix, qui fragilise les ménages les plus précaires.

Le tableau est pessimiste, mais des marges de manœuvres sont possibles pour s’adapter et faire face à cette multiplication des sécheresses.

  • Optimiser la gestion de l’eau

La panne sèche n’est pas encore là : nous disposons encore de ressources en eau dont l’efficience d’utilisation peut encore être améliorée. En France, le réseau d’eau potable perd ainsi annuellement 1 milliard de m3 sous forme de fuites (un chiffre à comparer aux 2,9 milliards de m3 prélevés pour l’irrigation en France), la faute notamment à des canalisations vieillissantes que les collectivités n’ont pas toujours les moyens de remplacer. L’entretien des réseaux apparait donc comme une priorité dans l’adaptation au changement climatique. Dans le secteur agricole, des marges de manœuvre sont aussi possibles, par exemple en changeant de mode d’irrigation. En France, l’irrigation par aspersion est la technique la plus répandue mais son efficience dépend du type de matériel utilisé : les enrouleurs consomment davantage d’eau que les pivots, dont les charges sont en plus moins élevées à l’hectare[9]. La micro-irrigation, qui consiste à apporter l’eau au plus près des racines, est la technique la plus efficiente mais elle est très couteuse et plus complexe à mettre en place. Elle reste réservée à des cultures à forte valeur ajoutée. L’adaptation des apports d’eau selon les besoins de la plante grâce à des outils d’aide à la décision permettrait également d’économiser l’eau à hauteur de 10 à 40%.

Le stockage de l’eau peut permettre d’assurer sa disponibilité en été, alors que les précipitations sont rares, via des retenues de substitution, également appelées bassines. Une option loin de faire consensus, comme l’a montré le conflit autour du projet de Sainte-Soline. Les promoteurs de cette solution soutiennent que les bassines sont indispensables pour maintenir la production agricole dans des zones touchées par des sécheresses estivales de plus en plus fréquentes, et qu’elles s’accompagnent d’un engagement des agriculteurs à faire évoluer leurs pratiques pour alléger la tension sur la ressource en eau, préserver la biodiversité, et s’engager dans une transition agroécologique. Leurs opposants craignent un accaparement de l’eau au profit d’un petit nombre d’agriculteurs, et voient les bassines comme un outil qui contribue au maintien de systèmes intensifs trop consommateurs d’eau. Ils pointent leurs impacts environnementaux et écologiques, ainsi que leur efficacité limitée par le fort taux d’évapotranspiration de l’eau à l’air libre, contrairement aux nappes souterraines. Au final, il apparait que le sujet doit être traité au cas par cas, car les conséquences environnementales sont liées à la nature des projets, différentes selon le fonctionnement des nappes, des cours d’eaux et des bassins versants concernés. On ne peut que regretter que le débat soit parasité par des positions dogmatiques non pertinentes au lieu d’être confiés aux seuls experts de la question et aux parties prenantes locales. Mais le sujet va continuer d’être d’actualité, puisqu’une proposition de loi récemment adoptée par le sénat[10] veut « consacrer le caractère d’intérêt général majeur des ouvrages de prélèvement et de stockage de l’eau agricole ».

Dans les régions sèches, plusieurs processus sont combinés pour assurer l’approvisionnement en eau. Les usines de désalinisation sont ainsi souvent présentées comme un moyen d’augmenter la quantité d’eau disponible à partir d’une ressource presque illimitée, l’eau de mer. L’Espagne est le principal pays européen à utiliser cette technique qui ne fournit cependant que 1 à 2% de la consommation du pays, mais c’est le Moyen-Orient qui concentre la moitié des capacités de dessalement mondiales[11]. Mais en dépit de ses attraits, la production d’eau dessalée présente plusieurs inconvénients majeurs, économiques et environnementaux. Ainsi, malgré des progrès techniques, qui ont permis de réduire son coût, elle revient à 5 à 10 fois plus cher que la captation de la ressource dans la nature, entre autres car elle nécessite beaucoup d’énergie. Outre son impact en termes de GES en cas d’utilisation d’une source d’énergie carbonée, le dessalement de l’eau de mer s’accompagne de la production de saumure, qui est rejetée dans la mer et affecte les milieux naturels.

La réutilisation des eaux usées offre des perspectives intéressantes pour augmenter la disponibilité de la ressource en eau. Strictement encadrée, elle est encore peu utilisée en France mais est plus fréquente dans d’autres pays européens comme l’Espagne ou l’Italie. Elle présente l’avantage d’être moins coûteuse et moins énergivore que la désalinisation et peut être utilisée pour l’irrigation. Mais elle reste chère par rapport à une eau conventionnelle et est principalement disponible à proximité des grandes villes, limitant son usage pour l’irrigation en zone agricole[12]. L’application d’un règlement européen qui vise à harmoniser les règles d’irrigation des eaux usées à partir du 26 juin 2023, risque de ne pas jouer en la faveur de cette technique, des changements dans les seuils de contrôle pouvant entraîner une augmentation des coûts liés à la réutilisation des eaux usées[13]. Le plan Eau dévoilé par le Président de la République en mars 2023[14] prévoit de lever les freins réglementaires pour faciliter le développement de cette technique et veut passer de moins de 1 à 10% de réutilisation d’ici 2030. Le lancement de 1000 projets de réutilisation tous secteurs confondus est même visé d’ici 2027, un objectif ambitieux alors que le Cerema n’en recensait que 145 en 2017[15].

  • Adapter les systèmes agricoles

Les systèmes agricoles existants fonctionnent de manière optimale dans des conditions de précipitations proches de la normale. Des adaptations techniques, comme le décalage des dates de semis, peuvent permettre de maintenir les rendements en cas de manque de précipitations temporaire. La couverture permanente des sols, la réduction du labour promue dans les techniques d’agriculture de conservation sont également prometteuses, car elles permettent en améliorant la structure du sol d’augmenter sa capacité de rétention et sa réserve en eau utile. Des innovations techniques peuvent également aider les cultures à mieux supporter les sécheresses. C’est le cas de l’agrivoltaïsme, qui peut permettre de limiter l’évapotranspiration sur cultures pérennes, mais dont le développement doit être accompagné avec précaution pour éviter le remplacement des cultures par des panneaux photovoltaïques. La piste des NBT (New Breeding Techniques) peut également permettre de développer des variétés plus résistantes à la sécheresse, mais elle n’est pas autorisée dans l’UE, qui discute actuellement de la révision du cadre réglementaire des techniques d’édition du génome.

Malgré tout, certaines cultures exigeantes en eau, comme l’avocat[16], ne sont pas durables si les sécheresses se poursuivent plusieurs années de suite et risquent d’être amenées à se réduire. En France, le maïs, qui représente un tiers des surfaces irriguées, est fréquemment pointé du doigt. Le sorgho est fréquemment présenté comme une alternative idéale pour le remplacer dans des systèmes plus économes. Il est moins exigeant en eau et l’alimentation animale constitue 80% de ses débouchés en Europe[17]. Cependant, ces débouchés manquent encore de structuration en France, illustrant un des principaux freins au développement de cultures adaptées au changement climatique : la construction des filières, de l’amont (sélection variétale, accompagnement technique) à l’aval. En effet, le sorgho présente des contraintes qui peuvent le rendre inadapté aux itinéraires techniques des producteurs : il nécessite pour être semé une terre réchauffée qui implique un semis plus tardif dans des sols qui risquent alors d’être trop secs pour la réussite de la culture, et une récolte plus tardive, qui peut compromettre l’implantation d’un blé ensuite. Enfin, en climat tempéré, sa productivité et sa rentabilité sont bien moindres que celles du maïs, et il ne peut se substituer que partiellement à celui-ci dans la ration des vaches laitières pour des raisons nutritionnelles[18].

Des politiques à coordonner

En réponse à la sécheresse de l’hiver 2022-2023, le gouvernement français a annoncé un plan de sobriété sur l’Eau concernant toutes les filières économiques et les particuliers. Il reprend plusieurs des stratégies présentées ci-dessus : soutien à la réduction de la consommation d’eau des particuliers, des administrations et des entreprises ; développement de la réutilisation des eaux usées, ou encore soutien aux collectivités pour entretenir les réseaux et réduire les fuites. Plusieurs mesures du plan, présenté en plein conflit sur le sujet brûlant des « mégabassines », concernent spécifiquement le secteur agricole. Le plan prévoit ainsi de soutenir les pratiques agricoles économes en eau, la récupération des eaux de pluies de toitures des bâtiments agricoles, ou encore la modernisation des ouvrages hydrauliques agricoles. Toutes ces mesures ne sont pas inédites, une bonne partie d’entre elles ayant déjà été évoquées dans le pacte issu des Assises de l’eau en 2019 et, pour le secteur agricole, lors du Varenne agricole de l’eau et du changement climatique de 2022. Au final, les principales « vraies » nouveautés proviennent des moyens associés à ces mesures, comme la fin du plafonnement des dépenses des Agences de l’eau, qui sera supprimé pour la prochaine programmation de leurs engagements à partir de 2025. De quoi assurer les aides supplémentaires qu’elles devront apporter pour soutenir la réduction des fuites (180 M€/an), la récupération des eaux de pluie des bâtiments agricoles ou la mise aux normes de station d’épurations (50 M€/an).

Le plan de sobriété sur l’eau vise une transformation durable des usages et de la gestion de l’eau. Mais en cas de sécheresse, les agriculteurs ont besoin d’outils pour faire face aux pertes économiques engendrées par les baisses de rendements ou les charges supplémentaires. Nous avions pointé en 2020 la lenteur de la réponse politique à la sécheresse estivale. Trois ans plus tard, les choses bougent petit à petit, comme en témoignent les différentes politiques nationales sur l’eau évoquées ci-dessus, ou encore la réforme de l’assurance récolte, qui indemnise les agriculteurs en cas de perte de rendement liée aux aléas climatiques. Le dispositif risque cependant de montrer ses limites si les agriculteurs rencontrent d’importants aléas plusieurs années de suite, le niveau d’indemnisation étant lié à un rendement moyen sur plusieurs années. Ce type de mécanisme de gestion des risques va donc devoir prendre en compte l’augmentation de la fréquence des événements climatiques extrêmes pour rester utile aux agriculteurs et rentable pour les assureurs.

Au niveau européen, l’adaptation au changement climatique, dont les événements climatiques extrêmes comme les sécheresses, est également portée par plusieurs politiques, comme la loi européenne sur le climat, la stratégie d’adaptation au changement climatique, ou encore la directive cadre sur l’eau, ou la PAC pour le secteur agricole. Ces politiques se sont multipliées ces dernières années à la faveur du Green Deal. Cependant, un rapport du Parlement Européen pointe le manque de synergies entre les différentes politiques, dont la multiplication réduit la lisibilité, donc l’efficacité. Par ailleurs, comme souvent, les règles ne sont pas les mêmes entre pays européens : par exemple, les laiteries néerlandaises ou belges sont autorisées à réutiliser l’eau extraite du lait (qui contient 85% d’eau) au cours de la transformation dans les process, ce qui n’est pas le cas en France. Le CNIEL milite pour obtenir cette possibilité qui permettrait d’économiser 25% de la consommation des sites de transformation[19]. Un travail de cohérence reste donc à mener pour améliorer la portée de ces politiques et voir leurs effets concrets.

Conclusion

Les quelques pluies qui ont arrosé le sud de la France et l’Espagne ces derniers jours ne suffiront pas à effacer les inquiétudes qui pèsent sur les récoltes. De plus, les épisodes de sécheresse ne sont qu’un exemple des aléas qui vont affecter de plus en plus fréquemment les systèmes agricoles, fragilisant les exploitations mais aussi le reste des filières. Le monde agricole a besoin d’un cadre réglementaire qui lui permette d’innover et de tester des solutions, que ce soit en termes de pratiques agricoles économes en eau ou de gestion de la ressource (stockage, réutilisation des eaux usées…), et d’une administration réactive, pour réduire les délais de mise en place des projets et indemniser les agriculteurs au moment où ils en ont besoin en cas de sécheresse. Comme toujours, il n’existe pas de solution miracle et il va falloir conjuguer toutes les solutions (optimisation de l’irrigation, adaptations techniques des itinéraires culturaux, choix des cultures et des variétés, développement des filières, limitation des pertes et amélioration de la gestion de la ressource) pour développer des systèmes résilients et éviter la guerre de l’eau au sein des territoires.

Le plan Eau français, qui prend la suite de nombreux travaux sur le sujet, esquisse une direction commune à prendre pour préserver l’accès et la disponibilité de l’eau et une répartition qui vise à équilibrer au mieux ses usages. Mais le dialogue de tous les acteurs, (agriculteurs, pouvoirs publics, agences de l’eau, associations…) sera indispensable pour obtenir des résultats et aller vers une gestion plus durable de l’eau, qui est l’affaire de tous.

Alessandra Kirsch, Directrice des études d’Agriculture Stratégies 

Lore-Elène Jan, consultante Agriculture Stratégies

Le 13 juin 2023

 

[1] https://publications.jrc.ec.europa.eu/repository/handle/JRC133112

[2] https://agreste.agriculture.gouv.fr/agreste-web/download/publication/publie/GraFra2022Chap3.1/GraFra2022_pratiques-culturales.pdf

[3] https://www.miteco.gob.es/fr/prensa/ultimas-noticias/la-reserva-h%C3%ADdrica-espa%C3%B1ola-se-encuentra-al-482-por-ciento-de-su-capacidad/tcm:36-564866#prettyPhoto

[4] https://www.lesechos.fr/industrie-services/conso-distribution/vols-deau-puisages-illegaux-la-secheresse-fait-craquer-le-modele-agricole-espagnol-1944526

[5] https://www.france24.com/fr/europe/20230513-sans-eau-nous-ne-sommes-rien-en-espagne-la-s%C3%A9cheresse-ravive-le-conflit-autour-du-tage

[6] https://www.mapa.gob.es/es/estadistica/temas/estadisticas-agrarias/regadios2021_tcm30-621075.pdf

[7] https://www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/STUD/2023/733115/IPOL_STU(2023)733115_EN.pdf

[8] https://www.nature.com/articles/s41558-021-01044-3

[9] Parangonnage sur les techniques et pratiques innovantes de gestion de l’eau en agriculture, rapport du CGAER n°21045, mars 2022

[10] https://www.senat.fr/travaux-parlementaires/textes-legislatifs/la-loi-en-clair/proposition-de-loi-pour-un-choc-de-competitivite-en-faveur-de-la-ferme-france.html

[11] https://www.ifri.org/sites/default/files/atoms/files/eyl-mazzega_cassignol_geopolitique_dessalement_eau_mer_2022.pdf

[12] https://www.agra.fr/agra-presse/reutilisation-des-eaux-usees-quel-potentiel-pour-la-ferme-france

[13] https://www.agra.fr/agra-presse/reut-le-futur-reglement-europeen-inquiete-la-filiere-agricole

[14] https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/23017_DP_PLAN%20EAU_annexes.pdf

[15] https://www.cerema.fr/system/files/documents/2020/07/2020_06_panorama_reut_pour_edition_vdef-1.pdf

[16] https://www.itfnet.org/v1/2020/11/spain-lack-of-water-poses-threat-to-the-expansion-of-avocado-in-malaga/

[17] https://www.sorghum-id.com/content/uploads/2020/02/fr-4-210×297-alimanimale.pdf

[18] http://www.journees3r.fr/IMG/pdf/Texte_3_Alimentation_B_Rouille.pdf

[19] https://franceterredelait.fr/pierre-barrucand-il-existe-encore-un-gros-potentiel-de-valorisation-de-leau-disponible-dans-les-laiteries

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