Trade & contract management

Agriculture, a global trade to urgently rethink

In this article published by Les Echos, Richard Hiault, a senior reporter and specialist in the international economy, perfectly describes the challenges of reforming the rules of international trade in agriculture by highlighting our work, in particular our second reference note. “Reforming multilateralism: a challenge for the European institutions and a solution for the CAP”.

ANALYSE – Depuis près de vingt ans, les négociations à l’OMC achoppent sur les questions agricoles. Une réforme s’impose avant que les égoïsmes nationaux ne s’imposent définitivement. Au détriment de l’Europe.

« Inventer un nouveau contrat mondial en matière agricole. » Au Salon de l’Agriculture,  Emmanuel Macron a placé la barre très haut. Présidant cette année le G7, le chef de l’Etat français l’a inscrit dans l’agenda. En matière agricole aussi, les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sont à revoir. S’érigeant en ardent défenseur du multilatéralisme, le président de la République va pourtant se heurter aux égoïsmes nationaux. L’histoire de l’OMC en témoigne.

Depuis près de vingt ans, l’agriculture constitue la pierre d’achoppement des négociations au siège de l’organisation à Genève. Lancé en novembre 2001,  le cycle de Doha devait ouvrir les marchés, réduire puis éliminer toutes formes de subventions à l’exportation et de soutien interne à l’agriculture.  En 2008, un accord semblait à portée de main . Au final, la mésentente liée au mécanisme de sauvegarde spéciale contre la hausse momentanée des importations agricoles fait capoter les négociations. Depuis, les discussions sont enlisées. Chaque pays défend ses avantages.

A la conférence ministérielle de l’OMC, à Bali, en 2013,  l’Inde, aux côtés d’une trentaine de pays en développement, s’émancipe des règles de l’OMC en matière de sécurité alimentaire. Le compromis devait être une solution temporaire jusqu’à ce qu’une solution permanente soit trouvée. Elle ne l’est toujours pas. Excepté en 2015, à la ministérielle de Nairobi, où  les pays membres se sont engagés à éliminer les subventions à l’exportation de produits agricoles , aucun accord majeur sur la politique agricole mondiale n’a eu lieu.  En décembre 2018, à Buenos Aires , les ministres n’ont même pas pu s’entendre sur la simple élimination des subventions… à la pêche illégale.

Des discussions enlisées

Aujourd’hui, les pourparlers se résument à une tentative de relance des discussions sur les aides internes à l’agriculture et sur la constitution de stocks alimentaires publics. Le chat est maigre. Face aux blocages, des experts s’interrogent régulièrement sur l’idée d’une sortie du secteur agricole de l’OMC. Au prétexte que les produits alimentaires de base ne sont pas de même nature que les produits industriels ou les services.

Dans une  note de recherche d’Agriculture Stratégies parue le mois dernier, Frédéric Courleux, son directeur des études, dénonce le fait que le logiciel de l’OMC, reposant sur la croyance dans l’autorégulation des marchés, n’est pas adapté. « Il est certain que l’OMC, sous le seul angle commercial et par une discipline des soutiens à l’agriculture biaisée par le présupposé de l’efficience des marchés, ne peut traiter à elle seule de façon satisfaisante l’ensemble des problématiques liées à l’agriculture. » Car l’agriculture couvre une large palette de problématiques liées à la lutte contre le réchauffement climatique, aux migrations, à l’environnement et à la souveraineté alimentaire de chaque pays. Les crises alimentaires à répétition, en particulier celle de 2007-2008, appelle pourtant à des solutions durables et efficaces. Mais l’absence d’une vision commune et partagée sur ces sujets complique l’équation agricole mondiale. D’autant plus que le multilatéralisme est en crise.

Egoïsmes nationaux

Pour Thierry Pouch, économiste et responsable du service des études économiques des chambres d’agriculture de France, « la mondialisation est en perte de vitesse et ce phénomène s’est accentué avec l’investiture de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis. Les grandes puissances économiques, qu’importe le poids de leur agriculture, s’orientent vers le bilatéralisme. Et se livrent un combat commercial sans merci ! » Les Etats-Unis illustrent parfaitement cette tendance.

L’accord commercial qui semble se profiler entre la Chine et les Etats-Unis contiendra probablement un volet agricole conséquent. D’autant plus que la Chine vient de se faire épingler par l’OMC, sur plainte des Etats-Unis, pour avoir trop aidé ses producteurs de blé et de riz. Et dans ses négociations éventuelles avec l’Union européenne, Washington entend inclure l’ouverture du marché européen à ses produits. Les Etats-Unis ont même osé instaurer des  droits de douane de près de 35 % sur les olives noires espagnoles, prétextant un cas de dumping. Bruxelles a porté plainte à l’OMC, soulignant que l’aide accordée aux producteurs espagnols est conforme aux règles multilatérales et n’exerce aucun effet de distorsion sur le commerce des olives. Il reste que, en s’attaquant à la doctrine de l’OMC, les Etats-Unis fragilisent un peu plus la position européenne à l’heure où une nouvelle politique agricole commune (PAC) est en discussion.

L’Europe attachée à l’OMC

L’Union européenne s’accroche encore aux règles multilatérales de l’OMC. Elle est l’une des rares « à poursuivre sur la voie du découplage des aides agricoles que les Etats-Unis ont remis en cause dès 2002 et abandonné en 2014 », observe Agriculture Stratégies. Depuis 1992, année de référence de la réforme de la PAC, « l’agriculture n’est plus vraiment une priorité pour Bruxelles, alors que l’instabilité des relations internationales […] appelle au contraire à l’inscription de l’agriculture à l’agenda stratégique de l’Union européenne  », déplorent Thierry Pouch et Pierre Blanc dans  le rapport « Déméter » 2019 .

Or, le prochain budget pluriannuel 2021-2027 de la PAC est en recul de 5 %, selon la proposition de la Commission européenne. Alors que toutes les grandes puissances agricoles renforcent leur soutien public à l’agriculture. Sans une forte position à l’OMC, l’Union risque d’être marginalisée. Emmanuel Macron l’a dit : « L’Europe agricole est aujourd’hui menacée. Elle l’est […] par des grandes puissances qui n’hésitent plus à adopter des stratégies offensives pour imposer leurs normes et leurs standards, par un ordre international qui, à force de considérer la nourriture comme une marchandise parmi d’autres, a fini par perdre son âme. » Mais, dans le contexte actuel, le nouveau contrat mondial qu’il appelle de ses voeux risque d’être une chimère.

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